Santianes de Pravia, l’église la plus ancienne du préroman des Asturies

L'église de Santianes de Pravia est un témoignage clé des débuts de l'architecture médiévale en Espagne. Un chaînon manquant entre deux mondes : l'art wisigoth et la naissance du préroman asturien. Des vestiges archéologiques suggèrent également que l'église pourrait avoir été construite sur un édifice romain tardif.

L'église de Santianes de Pravia est le reflet du Royaume des Asturies dans ses premières décennies ; un royaume encore en construction qui cherchait à consolider son identité et sa domination.

Lorsque le roi Silo déplace la cour asturienne à Pravia entre 774 et 783, il ne modifie pas seulement la géographie du pouvoir, mais jette également les bases d'un nouveau cycle artistique et politique. Pravia, héritière du Flavium Avia romain, offrait une position stratégique loin de l'isolement montagneux de Cangas de Onís. C'est dans ce contexte qu'est née Santianes de Pravia, l 'église la plus ancienne de la période préromane asturienne.

Conçue comme un oratoire palatial et un panthéon royal, l'église de Santianes a été fondée sous la dédicace de San Juan Evangelista (d'où "Sancti Joannis / Santianes"). Elle fut intégrée à un complexe palatial dont la localisation est incertaine et qui abrita brièvement la cour pravienne avant son transfert définitif à Oviedo. Selon les chroniques de l'époque d'Alphonse III, le roi Silo fut enterré dans le portique du temple, tandis que son épouse, Adosinda, petite-fille de Don Pelayo, fut contrainte de se retirer dans la vie monastique, en respectant les traditions de sa lignée.

Les Santianes de Pravia ont subi tant de modifications que la reconstitution de leur aspect d'origine a nécessité un travail archéologique minutieux. Bien qu'elle soit restée intacte jusqu'au début du XVIIe siècle, Don Fernando de Salas, après avoir obtenu le privilège d'être enterré à l'intérieur, entreprit à cette époque une reconstruction complète du chœur. Au XIXe siècle, de nouvelles interventions ont considérablement modifié l'église. Le portique d'origine avec la zone funéraire royale sur la façade ouest a été supprimé et un clocher a été érigé. La physionomie de l'église s'éloigne de plus en plus de son aspect d'origine.

Des personnages clés de l'historiographie des XVIe et XVIIe siècles avaient documenté l'état de l'église avant ces changements substantiels. Grâce à eux, le plan, la distribution et les éléments préromans de l'église étaient connus, des informations précieuses qui ont été utilisées lors des restaurations contemporaines. En 1975 et 1980, des études archéologiques ont confirmé l'existence d'un chevet semi-circulaire et perpendiculaire, typique des modèles paléochrétiens et wisigoths. Ces études, sous la direction de José Menéndez Pidal, ont été prolongées par des travaux de restauration (à certains égards un peu prétentieux) visant à éliminer les ajouts tardifs et à retrouver l'aspect du haut Moyen Âge. La façade du XIXe siècle a été déplacée et une tribune royale a été conçue qui, selon les experts actuels, s'inspire de temples un peu plus tardifs que ceux de la cour pravienne.

Santianes de Pravia a été déclaré Monument historique et artistique en 1931. Elle est actuellement en bon état de conservation et ses éléments architecturaux les plus importants peuvent être vus à la fois in situ, dans l'église elle-même, et dans le musée préroman Santianes (annexé à l'église), où sont exposés des vestiges archéologiques récupérés lors de fouilles.

L'intérieur conserve des arcs en plein cintre sur des piliers carrés, hérités de l'architecture wisigothique, qui deviendront ensuite un élément caractéristique de l'art asturien jusqu'à l'arrivée de la période ramirense.

Un autre de ses éléments les plus singuliers est le bénitier à immersion, creusé dans le sol de la nef droite. Sa présence est assez exceptionnelle dans le contexte asturien du VIIIe siècle, ce qui a conduit à l'hypothèse que l'église de Santianes n'était pas une construction entièrement nouvelle, mais une reconstruction d'une basilique paléochrétienne préexistante.

L'église de Santianes de Pravia conserve des fragments de l'acrostiche de Silo, une inscription confirmant le patronage royal du temple. La phrase "SILOPRINCEPS FECIT" (PRINCE SILO FAIT) était gravée sur une pierre labyrinthique et pouvait être lue dans plusieurs directions à partir d'un "S" central ; elle a été répétée plus de 45 000 fois. Bien que la pierre tombale originale ait été perdue, certains fragments sont encore visibles dans l'église et dans le musée préroman, où se trouve également une réplique qui montre à quoi elle ressemblait dans son intégralité. Le musée abrite d 'autres pièces de grande valeur archéologique, comme des portes décorées, des inscriptions épigraphiques et un relief gravé avec beaucoup de détails sur une dalle qui pourrait représenter le palais de Silo et d'Adosinda.

À l'intérieur de l'église se trouve un extraordinaire calvaire roman de la fin du XIIe ou du début du XIIIe siècle, composé d'un Christ crucifié et de deux personnages pleurant sa mort. Le Christ a le bras gauche mutilé et des restes de brûlures après avoir été jeté au feu pendant la guerre civile.

L'église de Santianes de Pravia n'est pas toujours ouverte au public, il est donc indispensable de prendre rendez-vous par téléphone au 985 821 204 ou par courriel : oficinaturismo@pravia.es.

Lors de la visite de l'église, nous pouvons en profiter pour visiter le musée préroman de Santianes, une installation où sont exposées non seulement des pièces archéologiques, mais aussi des maquettes, des panneaux d'information et une présentation audiovisuelle complète sur la cour du roi Silo.

Pour compléter cette fantastique journée culturelle, nous pourrons visiter Somáu, une belle localité située à seulement 8 kilomètres, qui a été classée Ville exemplaire des Asturies 2020, et qui nous surprendra par une autre architecture merveilleuse : l'architecture des Indianos.